Numéro 11 | Appel à contribution
LE SATIRE FAIT L’HISTOIRE
Événements, pratiques, langages
La satire est une pratique discursive complexe et polymorphe. Dans le domaine académique des études littéraires et artistiques, la satire a été analysée surtout en tant que genre. Genre que, par le biais de codes linguistiques spécifiques, critique et met en lumière les différents aspects de la société, de la culture et de la politique contemporaines, avec le double objectif de provoquer le rire et d’encourager la réflexion. Le numéro du mois d’octobre 2012 de Diacronie se propose d’étudier ce genre, ainsi que sa spécificité – qui le différencie de certaines pratiques analogues, telles que l’humour, l’ironie ou le sarcasme – à travers les nombreux liens qu’il établit avec l’analyse historique et les pratiques historiographiques. Le but n’est pas donc celui de faire “de l’histoire de la satire”, mais d’essayer d’une part de réfléchir sur la manière dont les productions historiques d’époques différentes peuvent contribuer à l’étude de l’histoire, d’autre part de se demander s’il est possible de parler d’histoire, et de communiquer les résultats des recherches, à travers les codes de la satire. Il s’agît ainsi de faire appel à un double regard, qui met l’accent surtout sur les problématiques de type discursif, linguistique et méthodologique, mais dans un domaine bien circonscrit et lié à la reconstruction et à l’interprétation d’événements, personnages et dynamiques du passé.
La satire est une forme d’expression étroitement liée à son l’époque, au point que, souvent, des textes satiriques sont incompréhensibles hors de leur contexte historique. En même temps, les figures liées à la satire, qu’ils soient des politiciens ou autres “types” humains, sont parfois transformées en “archétypes” transversales aux époques et aux cultures. L’objectif est toujours celui de rire du pouvoir et des costumes.
En se focalisant sur l’époque contemporaine, nous nous intéressera de voir comment, dans des époques et des contextes socio-politiques différents, les productions satiriques ont su représenter leurs temps, tout en en dévoilant les vices, ainsi qu’en proposant et promouvant des nouveaux éléments de réflexion et des nouvelles pratiques d’action. La tentative d’étudier la satire à droite et la satire à gauche peut nous aider à mieux comprendre les relations entre les différentes cultures politiques et les différentes pratiques culturelles et communicationnelles (par exemple, la méfiance répandue à gauche à l’envers de la satire et du rire, ou les mécanismes pour lesquelles dans les années ’50 et ’60 la satire a été perçue comme une pratique “de droite”). Sur ce même thème, il est important d’insister sur les “conséquences concrètes” que certains auteurs et certaines publications ont produit dans leur contexte social et politique, jusqu’à devenir des véritables acteurs de la scène idéologique et culturelle, mais aussi au cœurs des dynamiques parlementaires et gouvernementales au sens strict (voir par exemple la mobilisation de l’écrivain italien Giovannino Guareschi – le père du célèbre Don Camillo – contre la loi électorale du 1953). Comme l’a rappelé Attilio Brilli, en fait, la satire a souvent contribué à «transmettre l’histoire d’une tradition subversive, antagoniste, qui vise à secouer […] les structures hiérarchiques cristallisées et les visages charismatiques du pouvoir» (Dalla satira alla caricatura: storia, tecniche e ideologie della rappresentazione, Bari, Edizioni Dedalo, p. 12). Mais si la satire peut devenir un instrument de lutte politique contre les pouvoirs, elle peut en même temps être employée par les pouvoirs mêmes comme moyen de propagande, de manière plus ou moins explicite et déclarée (l’exemple est celui de la propagande nazie contre le peuple juif).
Nous voulons aussi comprendre comment la satire contemporaine nous parle du passé et de quelle manière les satiristes jouent parfois le rôle d’historiens, jusqu’au point, souvent, d’influencer les perceptions du public. De plus en plus nous assistons à la publication d’ouvrages positionnées dans un espace intermédiaire très subtile entre deux pratiques et deux langues apparentement aux antipodes: l’historiographie et la satire. Souvent, l’humoriste, le caricaturiste, le dessinateur de BD traite, même avec profondeur, des thèmes historiques de grande complexité, en recourant à des codes hybrides. Prenons juste pour exemple le nombre de graphic novel ou de BD basés sur des détaillées recherches historiques, communiqués à travers un langage qui mêle les tons académiques et les codes purs de la satire, de l’humour et de la caricature.
Enfin, d’un point de vue purement linguistique, il serait intéressant de saisir les nombreux liens entre la dimension graphique-lexicale et l’idéologie qui l’a engendrée, en travaillant sur les codes linguistiques spécifiques, leur polymorphisme et leurs contradictions, ainsi que sur leur liens avec d’autres genres.
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